dimanche 22 mai 2011

Les imperfectionnistes - Tom Rachman


Les imperfectionnistes, ce sont onze courts récits mettant en scène onze personnages : leur caractère, leurs manies, leur vie personnelle et professionnelle, les richesses et carences de l’une et de l’autre…
Tous sont reliés par un journal jamais nommé, international, de langue et de culture américaines, mais basé à Rome par le caprice de son fondateur Cyrius Ott. De brefs interludes sur ce dernier et sur la genèse de cette improbable publication viennent ponctuer le roman, formant comme un douzième portrait en pointillés.

Courtes nouvelles de qualité, ces portraits incisifs sont autant de chapitres se recoupant, se complétant, s’éclairant les uns les autres – où le héros de l’une devient personnage secondaire de l’autre.
On découvre ainsi successivement : Kathleen Solson, rédactrice en chef impitoyable et carriériste ; Llyod Burko, correspondant parisien dépassé et prêt à tout pour passer un article ; Hardy Benjamin, responsable de l’économie, désespérément en quête d’affection ; Herman Cohen, correcteur intransigeant à la vie finalement « pas si mal » ; Arthur Gopal, chargé des nécrologies et des brèves, dont un drame va curieusement propulser la carrière ; Ornella de Monterrecchi, lectrice trop consciencieuse encore plongée dans les numéros de 1994 ; Ruby Zaga, vieille fille aigrie et paria de la rédaction ; Winston Cheung, pigiste débutant au Caire confronté à la dure réalité de ce métier ; Craig Menzies, rédac chef adjoint que sa bonhomie perdra ; Abbey Pinnola, DRH obéissante ; Oliver Ott, directeur de la publication incompétent, débarqué en Italie par les hasards de l’héritage.

La caricature est évidemment le premier écueil d’un tel roman choral, surtout quand il s’agit du premier : mais Tom Rachman a l’intelligence de pousser certaines postures tellement loin (la fille aigrie, la « bonne poire », la carriériste forcenée...) qu’il en fait des archétypes fascinants. Les traits spécifiques de ces onze individus et le talent employé pour leur donner chair les rendent souvent étranges, tantôt attachants tantôt détestables, mais toujours complexes.

On voudrait que le livre soit plus long, que chacun des onze Imperfectionnistes reviennent sur le devant de la scène pour un second acte.
Et c’est là le seul véritable défaut de ce très bon roman - sur le monde de la presse, mais surtout sur la matière inépuisable que constitue l’être humain : il est trop court.


Les imperfectionnistes, Tom Rachman (Grasset, 400 pages, 2011)
Traduit de l’anglais (États-Unis) par Pierre Demarty

2 commentaires:

  1. Des personnages très attachants, une lecture très agréable... Je le recommande!! Merci Lily! Jamais déçue par tes conseils, comme d'hab! Bises Armelle

    RépondreSupprimer
  2. Je vais rougir... Mais oui, celui-ci est vraiment une petite perle!

    RépondreSupprimer