mardi 22 mars 2011

L’Origine de la violence - Fabrice Humbert


Pas évident de donner mes impressions sur ce livre : des critiques quasi unanimes, un ressenti mitigé et une histoire pourtant pleine de sens.

Lors d’une visite de Buchenwald avec ses élèves, le narrateur, jeune professeur de littérature, est comme happé par une photographie représentant le médecin du camp : à l’arrière-plan, un prisonnier ressemble étonnamment à son propre père, Adrien Fabre.
La ressemblance est trop frappante, l’impression d'étrangeté est trop forte, et Adrien élude un peu trop le sujet quelques semaines plus tard…
De là, commence un travail de reconstitution et d’enquête grâce auquel le narrateur découvre un pan inattendu de son histoire familiale. Il trace peu à peu le portrait de David Wagner – un détenu juif parmi tant d’autres, tailleur parisien rêvant de réussite, jeune homme charmeur et opportuniste, victime des camps de la mort… Son véritable grand-père.
Inlassablement, notre héros poursuit sa quête, cherche des explications : en Allemagne où il s’installe et tente de reconstituer à la fois les événements autour de la mort de David et le destin des protagonistes, en Normandie où sa grande famille bourgeoise se réunit ponctuellement, à l’hôpital où son grand-père Marcel – l’autre, celui de toujours – accepte enfin de lever le voile.

Si on ne se débarrasse pas aisément d’une telle révélation, on ne tourne pas davantage le dos à une filiation, une appartenance : Adrien est bien plus le fils de Marcel Fabre que de David Wagner, et le narrateur son petit-fils. Fabrice Humbert explore avec finesse la filiation, le poids des origines « véritables », celui de l'éducation et bien entendu la force du secret de famille.

Une trame intéressante, une écriture fine et percutante : tout est là pour faire un grand roman. Et pourtant, L’Origine de la violence ne m’a pas réellement plu. Il m’a malheureusement fait enfin comprendre ce qui me déplaît souvent dans les textes teintés d’autofiction : l’autopsychanalyse. Certes, le héros veut comprendre « l’origine de sa violence » mais le décorticage méthodique des uns et des autres est l’occasion de développements parfois très longs, voire ennuyeux.
Une partie importante du récit est consacrée aux camps : et, c’est terrible à dire mais, pour qui a lu ne serait-ce que Primo Levi et Jorge Semprun, ce n’est pas toujours passionnant. Ici, l’auteur aurait dû selon moi se concentrer sur le factuel, et moins se précipiter dans les considérations plus générales sur une thématique explorée déjà si finement.

Une impression étrangement mitigée donc : L’Origine de la violence est une histoire intéressante, traitée avec subtilité, les réflexions sont pertinentes… mais des longueurs, des développements peut intéressants et un certain narcissisme m’ont déçue.


L’Origine de la violence, Fabrice Humbert (Le Passage, 320 pages, 2009 / Livre de Poche, 352 pages, 2010)


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